Avant le reportage photographique disponible à partir d'avril, voici quelques photos et un compte rendu de l'expé : Ouverture de "100 ans de solitude" 800m 6b A2+ sur le Cerro Noémie Walwalün.

Le monde est petit. Le 28 décembre 2001, au "Climbing Planet", la plus belle salle d'escalade de Santiago nous faisons la connaissance Juanjo Fernandez son gérant et Pere Vilarasau, deux grimpeurs très actifs au Chili et en Patagonie. Ils ne sont encore jamais allés à Cochamo, mais nous confirment les infos sur l'intérêt et la qualité des parois de cette vallée. En outre ils nous font découvrir quelques falaises proches de la capitale... Le 31 décembre, nous avons du mal à trouver un muletier pour nous aider à transporter l'équipement, jour férié oblige. C'est finalement un jeune du village, Eduardo qui nous accompagnera, il vient de monter une agence de trek à cheval, et nous sommes ses premiers clients.

Pluie, végétation et mouches… Le contact avec la nature se fait très rapidement. Dès les premiers moments dans la vallée de Cochamo, nous pouvons observer trois phénomènes qui resteront très présents les semaines avenirs : l'eau, la végétation et les mouches. La pluie nous oblige à sécher toutes nos affaires régulièrement tous les deux ou trois jours, mais dès qu'un rayon de soleil illumine le ciel apparaît un autre phénomène : une espèces de gros taon rouge et noir, "los Tabanos" qui attaquent en bande et mordent même sous les vêtements. Nous ne quittons donc pas les habiles épais qui nous protègent par la même occasion d'une végétation impénétrable. La première semaine, ayant perdu notre chemin il nous faudra plus de cinq heures de machette pour aller à l'attaque de la voie française "Le Bout du Bout du Monde" à la Piedra del gorila. La voie de 500m, en 6c et A2 est magnifique. Cependant un peu engagée quand même, avec des protections hasardeuses dans des fissures évasées. La dernière longueur nous résiste, et nous redescendons, déjà un peu plus humbles qu'au départ. Nous pouvons à présent nous attaquer à notre projet : ouvrir une voie nouvelle. Nous scrutons le paysage à la recherche d'une paroi qui nous attire et qui serait sortable avec le temps qui nous reste. Nous rencontrons un berger avec qui nous discutons et qui nous indique quelques sommets vierges et nous met en garde sur la difficulté d'accès. Nous décidons le lendemain de remonter une vallée afin de voir des faces de plus près. Nous mettons plus de temps que prévu à tailler un chemin et c'est en 2 jours que nous arriverons au pied de la face qui nous intéresse et qui devient notre objectif. Il nous reste à élargir ce chemin qui ressemble souvent à un long tunnel dans une forêt verticale, puis acheminer le matériel jusqu'à l'attaque, friends, pitons, coinceurs, cordes. Les gros sacs s'accrochent dans branches, nous glissons sur les dalles de granit mouillé, souvent nous sommes prés de craquer. Un jour en descendant d'un portage, alors qu'il pleut averse nous restons bloqués par deux rivières en crue, entre le camp avancé et le camp de base. Avant que le débit ne baisse, nous passons 24 heures sans manger. Tailler ce chemin sera la partie de notre séjour qui nous aura coûté le plus d'énergie physique et mentale.

L'ouverture est un vrai plaisir d'escalade. Après tant de difficultés d'accès, nous la dégustons. Nous aurons quatre jours dans la paroi pour ouvrir une voie moins difficile que prévue : une longueur d'artif seulement, et du libre jusqu'au 6b+ pour une voie de 800m de haut avec 200 m peu difficiles en 3 et 4. Elle reste cependant assez homogène dans le 5-6. Elle est bien fissurée, facile à protéger (les gros friends font un malheur), et parfois il faut un coup de poker pour choisir une fissure qui d'une part soit grimpable en libre, et d'autre part nous dirige dans l'axe du sommet. La section supérieure, raide et très aérienne, nous réserve une escalade splendide en opposition. Nous avons la chance, le jour du sommet d'avoir un temps splendide (quelques tabanos, de toute façon). La descente jusqu'au bivouac en paroi est un grand moment. Alors que l'un des deux équipes le relais, l'autre peut admirer le coucher de soleil sur les cônes des volcans, puis la montée du voile des étoiles de l'hémisphère sud.

Un lendemain moins drôle. Alors qu'il nous reste à équiper un peu moins de la moitié des rappels, une pluie glaciale, 4 ou 5 °C nous accueille et la paroi se transforme en torrent. Nous équipons les relais hors crue, mais tirons les rappels sous de gigantesques cascades. Une fois au sol, le Chemin du retour et les gués sur les rivières en crues à nouveau sont impraticables. Il nous faut trouver un abri pour la nuit. Celle-ci se passera sous un rocher et débutera comme souvent par le séchage des différents accessoires : chaussures, chaussettes, duvets. Avant cela il faut démarrer le feu (au réchaud, c'est plus simple pour le bois mouillé), et sécher du bois au fur et à mesure. Manque de chance, l'eau ruisselle sous le rocher détrempe les duvets, refroidie le corps et fait espérer le jour. La descente enfin au camp de base est longue et très délicate pour les deux grimpeurs mouillés et fatigués, dégoûtés par le mauvais temps et impatients de retrouver un peu de confort.

Le Beau visage de Cochamo A la fin du séjour comme s'il n'avait jamais plut, Cochamo nous montre son beau visage ensoleillé, et invite à une dernière ascension sur le plus beau monolithe du coin : Le Cerro Trinidad. En cette dernière journée, nous faisons l'escalade de la voie argentine 600 m 6a, en face Nord, et sur un granit éclatant de soleil, comme une réconciliation avec la météo, un bel au revoir à la vallée.

 
 
 
   
 

 

 

 

 

 

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